Le vent soufflait fort sur les montagnes qui dominaient la vallée de l’Est. Les nuages tourbillonnaient dans un ciel d’acier, comme si la nature elle-même ressentait le retour d’un être dont le pouvoir avait changé le monde.
Au pied d’une falaise escarpée, dans une grotte fortifiée, les troupes de Kael, affaiblies mais tenaces, attendaient. Certains pansaient leurs blessures, d’autres méditaient en silence ou renforçaient les défenses, mais tous avaient le regard tourné vers l’horizon. Ils ne savaient pas où Kael était parti. Seul Sira, sa plus proche alliée, savait qu’il était en quête d’un savoir ancien, guidé par son sceau.
Le silence fut brisé.
Une onde se propagea dans l’air, une vibration familière, étrange et puissante. Les torches s’éteignirent d’un coup. L’espace d’un instant, l’ombre avala tout.
Puis il apparut.
Kael.
Il n’avait pas besoin de mots. Sa seule présence suffisait à faire taire les doutes et à apaiser les cœurs. Mais ceux qui le connaissaient virent immédiatement la différence : sa posture, son aura, son regard. Kael n’était plus simplement un chef. Il était devenu un symbole vivant, presque divin.
Sira s’approcha, stupéfaite.
Sira : « Tu es… différent. Ton énergie… elle s’élève comme une mer enragée. »
Kael (calme, mais tranchant) :
« J’ai vu ce que je pouvais devenir. Ce que je dois devenir. Nous ne sommes plus des fuyards. À partir de maintenant, nous sommes une nation. »
Un silence sacré suivit.
Puis, un rugissement. Un cri de ralliement. Un espoir renouvelé.
Kael rassembla ses troupes, les yeux levés vers une carte détaillée du continent. Il désigna une région frontalière, abandonnée, déchirée par les conflits entre royaumes humains. Un territoire sans foi ni loi.
Kael : « Là-bas. Nous bâtirons une autre cité des hybrides. Libre. Forte. Et protégée par moi. »
Il leva sa main. Une lumière sombre, bordée de pourpre, jaillit de son sceau. Elle forma dans l’air le plan d’un bastion colossal, une cité forgée par magie, taillée dans la roche, nourrie de l’énergie élémentaire et protégée par des barrières anciennes. Une capitale pour les rejetés.
Kael : « Ceux qui se croient élus croient que notre monde leur appartient. Ils pensent que notre existence est une erreur. Nous leur prouverons que nous sommes le futur. »
Et dans les jours qui suivirent, Kael guida personnellement ses troupes dans la première grande expédition : récupérer les artefacts anciens cachés dans les ruines du monde, attirer les clans hybrides éparpillés… et commencer la construction de Vanyr, la nouvelle Citadelle des Bannis.
Mais au loin, dans l’Empire, les Onze Chevaliers Sacrés qui avaient abandonné la poursuite de la dernière bataille mais avaient reussit à recuperer des territoires contrôlés par les hybrides, sentaient le changement. Le nom de Kael n’était plus un murmure de rébellion… Il était devenu une menace d’ascension extrême.
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Le vent s’engouffrait dans la vallée oubliée comme un chant ancien. Entourée de montagnes abruptes et de forêts impénétrables, la terre choisie par Kael n'était qu'un territoire désolé. Mais dans cet écrin de pierre et de silence, un rêve prenait racine : bâtir Vanyr, la nouvelle cité des hybrides.
Kael se tenait au sommet d’un promontoire rocheux. Autour de lui, ses lieutenants et bâtisseurs l’observaient, attendant ses ordres. Son bras droit tendu, le sceau pulsant à la lumière du crépuscule, il canalisa une immense vague d’énergie.
Des piliers de roche s’élevèrent du sol, taillant une forme circulaire massive. Le sol trembla, les arbres furent repoussés par une force invisible, et une clairière parfaite se forma : l’Anneau de Fondation.
Kael : « Ce lieu sera vivant. Il respirera notre rage, notre volonté… et notre espoir. »
Sira, restée silencieuse, esquissa un sourire en voyant les troupes se mettre en mouvement.
Les meilleurs maîtres-constructeurs hybrides, des mi-hommes mi-démons, des mages de terre nés parmi les rejetés, et même d’anciens humains exilés, vinrent prêter main forte. Ils travaillaient jour et nuit, guidés par les visions de Kael et les schémas projetés par le sceau.
Le cœur de Vanyr fut conçu comme une spirale défensive : un noyau magique au centre, protégé par sept anneaux de pierre, de feu, d’ombre et de lumière. Chaque anneau était destiné à une fonction : habitation, formation, stockage, armement, conseil, recherche, et enfin, le Trône de l’Aube Noire, le bastion de Kael.
Mais la terre, ancienne et sauvage, se défendait. D’antiques golems de pierre surgissaient parfois, réveillés par les perturbations magiques. Des bêtes spirituelles errantes attaquaient les ouvriers, comme si elles refusaient que la paix s’installe.
Kael dut les affronter en personne.
Un soir, un dragon spectral surgit des profondeurs de la montagne. Immense, fait de flammes bleues et d’os, il fonça sur les structures encore incomplètes. Le combat fut titanesque. Kael, usant de sa magie élémentaire et de la manipulation du temps, ralentit le monstre, le désintégra partiellement, puis le scella dans un anneau magique, l’obligeant à servir de gardien des portes.
Après six semaines de construction surnaturelle, Vanyr s’éleva fièrement au milieu des montagnes. Ses murs noirs, incrustés de runes anciennes, reflétaient les étoiles. Ses tours touchaient presque les nuages. La magie y circulait dans chaque pierre, chaque fontaine, chaque rue. Des miroirs d’énergie permettaient de se déplacer instantanément à travers la ville. Une barrière magique enveloppait l’ensemble, impénétrable.
Et à l’entrée principale, gravé en lettres d’argent dans un portail de cristal :
« Ici commence la fin des empires. »
Lorsque la ville fut prête, Kael convoqua tous ses partisans. Des centaines, puis des milliers d’hybrides et de marginaux affluèrent. Dans la grande place du cœur de Vanyr, il prit la parole :
Kael : « Aujourd’hui, nous ne sommes plus des fuyards. Nous sommes une nation. Ceux qui n’ont jamais eu de maison... en ont une. Ceux qui ont été rejetés... sont désormais honorés. Et ceux qui rêvent d’un monde libre... marcheront à mes côtés. »
Il leva le poing. Le sceau sur son bras s’illumina, projetant dans le ciel le symbole de la cité : une lune noire traversée par une flamme rouge.
Kael : « Que les empires tremblent. Vanyr est née. »
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Les jours de calme à Vanyr furent brefs.
À peine la cité érigée que Kael sentit un appel… un frisson dans l’air. Le sceau sur son bras vibrait de plus en plus fort, comme s’il cherchait à le guider une nouvelle fois. Il rêvait chaque nuit d’un désert rouge, d’une tour brisée, et d’un feu éternel.
Sira, inquiète, le confronta : Sira : « Ton sceau t’envoie encore des visions ? » Kael : « Oui. Vers l’Ouest. Il y a quelque chose… ou quelqu’un. »
Elle fronça les sourcils. Sira : « C’est une ancienne zone de guerre. On l’appelle Héradros. Plus aucun royaume n’ose y entrer. Même les Démons l’évitent. »
Kael : « C’est là que je dois aller. Un clan y survit encore. Et je vais les rallier. »
Kael partit avec un petit groupe d’élite : Sira, Velm, et trois nouveaux membres — un télépathe hybride, une invocatrice d’ombres et un maître des lames. La route fut longue, traversant des zones mortes où même la magie semblait s’éteindre.
La terre était brûlée, fissurée, couverte de ruines. Héradros n’était pas un désert naturel : c’était une tombe, un lieu marqué par une magie ancienne, probablement celle des Douze Chevaliers eux-mêmes.
Mais dans les entrailles de cette désolation, un souffle de vie persistait.
Au pied d’une falaise noire, Kael trouva un village souterrain caché, protégé par un labyrinthe de pierre mouvante. Grâce à son sceau, il força le passage sans déclencher les pièges. Là, il rencontra les survivants : un clan d’hybrides mi-démons mi-vampires, anciens exilés du Royaume démoniaque, trahis par les leurs et pourchassés par les humains.
Leur chef, une femme nommée Liryss, avait les yeux aussi rouges que le sang et une aura incandescente.
Liryss : « Tu dis bâtir une nation pour les nôtres… mais es-tu prêt à porter leur colère ? Leur folie ? Leur haine ? »
Kael : « Je suis leur reflet. Leur avenir. Et je n’ai pas peur de ce qu’ils sont… car je suis comme eux. »
Pour les convaincre, Kael dut passer l'Épreuve des Cendres : marcher à travers le Feu Éteint, une mer de braises hantée par les souvenirs des morts du clan. Là, il revécut les crimes de son sang, les horreurs infligées aux siens, et affronta un simulacre de lui-même, créé par la magie de la haine.
En ressortant, marqué mais debout, il s’adressa au clan : Kael : « Je ne vous promets pas la paix. Je vous offre la guerre. Mais une guerre pour ne plus fuir. Une guerre pour bâtir. »
Liryss accepta, et avec elle, près de trois cents combattants hybrides. Des experts du feu infernal, des assassins du néant, et un ancien démon du nom de Therrak, un colosse maniant la lave comme une dague.
Kael leur promit un rôle central dans la défense de Vanyr, et plus encore : une place autour de la future Table des Sceaux, un conseil secret destiné à guider l’expansion de leur nation.
Mais ils n’étaient pas seuls.
Dans les hauteurs d’Héradros, dissimulé derrière un voile magique, un homme vêtu d’une armure éclatante les observait. Ses yeux, blancs et inhumains, captèrent chaque mot, chaque geste. Il disparut sans un bruit.
L’un des Douze avait été informé.
La marche vers la guerre totale venait de s’accélérer.